DIALOGUE & DEMOCRATIE SUISSE


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La démocratie suisse

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Démocratie, le laboratoire suisse

publié par Antoine Bevort - Professeur de sociologie - CNAM Paris. Chaire d’analyse sociologique du travail, de l’emploi et des organisations - 2 rue Conté - 75003 PARIS - tél. 01 40 27 24 31 - courriel : abevort@free.fr

« Les défauts de la démocratie exigent plus de démocratie et non pas moins.» Amartya Sen [2006, p. 45.]

Si de façon générale, comme l’observe J. Beaudouin, « la sociologie politique a mal à la démocratie » [1998, p. 130], son malaise à l’égard de la démocratie directe est encore plus manifeste. On considère souvent un peu rapidement que la souveraineté populaire à l’athénienne est inapplicable dans nos sociétés modernes pour des raisons comme la taille ou la complexité des affaires publiques. Ainsi, D. Chagnollaud estime que « si ce procédé a pu jouer dans la cité grecque antique, force est de constater qu’il n’est guère praticable à l’échelle d’un grand pays » [1993, p. 51]. Aux yeux de M. Hansen, historien danois, spécialiste de la démocratie athénienne, cet argument très courant apparaît de moins en moins pertinent et « revient à ignorer que la technique moderne a rendu tout à fait possible un retour à la démocratie directe – que ce soit souhaitable ou non est une autre question » [1993, p. 21]. L’écho récent rencontré par les dispositifs participatifs n’a pas levé les doutes quant à l’intérêt de donner aux citoyens, outre le droit de vote, un réel pouvoir de décision dans les sociétés contemporaines.

L’exemple suisse reste ainsi étonnamment peu sollicité dans le contexte d’un débat pourtant vif sur la crise politique des démocraties représentatives. Il ne suscite le plus souvent qu’un intérêt anecdotique – qui n’a entendu ou lu de rapides propos moqueurs sur la Landsgemeinde d’Appenzell Rhodes-Intérieures, réduit à une forme démocratique pittoresque mais sans intérêt pour nos complexes sociétés contemporaines – ou conjoncturel, comme après la votation sur les minarets en novembre 2009. Le cas suisse est par exemple absent dans Le nouvel esprit de la démocratie, Actualité de la démocratie participative, de Loïc Blondiaux [2008]. L’ouvrage de Marie-Hélène Bacqué, Gestion de proximité et démocratie participative, une perspective comparative [2005], fait à cet égard exception, mais le chapitre consacré à la Suisse, intitulé « À propos de la démocratie directe », signé par Bernard Voutat, est une des rares contributions très critiques de l’ouvrage. Ce point de vue sceptique sur le cas suisse illustre le résultat un peu étrange de connaissances et d’éloges plus approfondis sur les budgets participatifs sud-américains que sur les votations suisses.

Comme l’indique l’intérêt citoyen pour les votations dont a témoigné, après le référendum européen de 2005, la votation citoyenne sur la poste en 2009, le système politique suisse mérite cependant une attention renouvelée. En effet, depuis l’institution du référendum constitutionnel obligatoire en 1848 et de l’initiative populaire en 1891, les votations suisses sont une des manifestations contemporaines de démocratie directe les plus abouties. Après avoir rappelé de quelles façons les institutions de la démocratie directe marquent de leur empreinte le système politique suisse[1], l’article évalue l’importance et la portée de ces droits, avant de les confronter en conclusion à la théorie de la démocratie consociative d’A. Lijphart [1977] et de G. Lehmbruch [1993], dont la Suisse représente à leurs yeux un exemple privilégié.

1. Les « droits populaires » dans le système politique suisse

Le système politique suisse peut être défini comme une démocratie semi-directe, un mixte de démocratie directe et représentative dans lequel le peuple participe avec le gouvernement et le Parlement aux prises de décisions politiques. Avec le fédéralisme et la concordance (associée au principe de la collégialité), les institutions de la démocratie directe sont un des trois piliers du régime politique suisse.

Le fédéralisme, sa caractéristique la plus ancienne et probablement la plus connue, remonte à l’année 1848, quand la Suisse a transformé son système politique en État fédéral. Aujourd’hui, la Suisse est un régime fédéral composé de vingt-cinq cantons, dont le bicamérisme équilibré des chambres Parlementaires est l’expression. Représentant les cantons, le Conseil des États compte quarante-six sièges répartis à raison de deux sièges pour chacun des vingt cantons et d'un siège pour chacun des demi-cantons (Obwald, Nidwald, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Appenzell Rhodes-Extérieures et Appenzell Rhodes-Intérieures). Ainsi le canton de Zurich, qui compte 1 million d'habitants, élit deux conseillers au Conseil des États, tout comme Uri qui a moins de 36 000 habitants. Le Conseil national, dont les membres sont élus à la représentation proportionnelle au prorata du nombre des habitants des circonscriptions cantonales, dispose du même pouvoir que le Conseil des États [Kriesi, 1998].

Les deux conseils aux pouvoirs identiques forment l’Assemblée fédérale qui fonctionne selon le principe de la « concordance », deuxième caractéristique essentielle du système politique suisse. La démocratie de concordance, « notion équivalente, parmi les politologues de langue allemande, à celle de démocratie consociative forgée par Lijphart » [Lehmbruch, 1993, p. 44], renvoie au fait que « les décisions ne se fondent pas sur la règle de la majorité, mais sur la recherche d’accords à l’amiable ou de compromis »[2]. Les principales forces politiques acceptent généralement le jeu du compromis plutôt que celui de la majorité et de l’opposition. Il n’y a donc pas de véritable parti d’opposition. Ce principe, qui remonte dans sa version contemporaine aux années 1930, se traduit notamment dans la composition du gouvernement helvétique, nommé le Conseil fédéral, comprenant les représentants des principaux partis politiques suisses en fonction de leurs nombres d’élus au Conseil national. La concordance est inséparable de l’esprit de collégialité qui fonde la responsabilité collective de tous les membres du gouvernement qui fonctionne comme un collège solidaire[3].

Les sept membres du gouvernement sont élus par l’assemblée fédérale, réunissant les deux chambres, selon une clef de répartition dite la « formule magique » de 2+2+2+1, instaurée en 1959. La clef de répartition fixe la composition du gouvernement, attribuant deux représentants au parti socialiste suisse (PSS), au parti radical socialiste (PRS) et au parti démocratie chrétien (PDC), et un représentant à l’union démocratique du centre (UDC). Depuis 2003, la formule magique a été modifiée suite à l’audience électorale croissante de l’UDC qui a remplacé le PDC comme une des trois grandes forces politiques[4]. Sa double représentation au sein de l’exécutif, acquise en 2003 aux dépens du PDC, a été cependant réduite par la démission du parti d’un de ses membres, tout en restant membre du Conseil fédéral. Actuellement, le Conseil fédéral comprend deux UDC (depuis 2008, 1 + 1 parti bourgeois démocratique), deux PSS, deux PRD[5], et un PDC. Les membres du Conseil fédéral sont élus pour un mandat de quatre ans renouvelable[6]. Le Conseil fédéral est assisté et conseillé dans le déroulement de ses affaires par la Chancellerie fédérale. Le Chancelier, également élu, qui prend part aux réunions hebdomadaires du cabinet avec un rôle de consultation, est parfois appelé de manière officieuse « le 8e conseiller ». La présidente ou le président de la Confédération change chaque année. Cette fonction ne confère aucun pouvoir ou privilège spécifique, et le président ou la présidente continue d'administrer son propre département.

Les droits populaires

« On appelle droits populaires (l'expression n'existe qu'en Suisse), ceux qui, parmi les droits politiques, permettent aux citoyens de participer aux prises de décision par le biais de votations. »[7] La pratique des votations citoyennes remonte à la Révolution française de 1793. « C’est la procédure d’adoption de la seconde Constitution helvétique de 1802 qui consacre pour la première fois sur le sol suisse le principe du scrutin populaire. » [Micotti, 2003, p. 21] Les premiers référendums constitutionnels et législatifs apparurent dans divers cantons dans les années 1830, préparés par la multiplication de pétitions.

Les votations citoyennes suisses se présentent aujourd’hui sous trois formes : les référendums obligatoires, les référendums facultatifs et les initiatives populaires qui se déclinent selon des modalités spécifiques aux niveaux fédéral, cantonal et communal. Au niveau fédéral, le référendum obligatoire, qui existe depuis 1848, concerne toutes les modifications de la Constitution, de même que l’adhésion de la Suisse à certaines organisations internationales comme l’OTAN, l’ONU. L’adoption de telles dispositions requiert la double majorité du peuple et des cantons. Le 27 septembre 2009, la population suisse a ainsi accepté deux projets de modification constitutionnelle : le relèvement de la TVA en faveur de l'Assurance invalidité (AI) par 54 % des voix et une petite majorité des cantons. Le taux de participation s’est élevé à 41 %. La majorité des cantons alémaniques se sont montrés hostiles, alors que la Suisse romande a voté unanimement pour le financement additionnel en faveur de l'AI. Les grandes villes ont en général été favorables.

Le référendum facultatif, instauré en 1874, intervient quand, dans les cent jours qui suivent l’adoption d’une loi par le Parlement, 50 000 citoyens signent un texte demandant un vote de l’ensemble du corps électoral. Huit cantons peuvent également déclencher un référendum facultatif. La loi, ou les arrêtés et accords assimilés à des lois, ne peuvent alors entrer en vigueur que si les électeurs l’approuvent. En pareil cas, seule la majorité du peuple est requise. Selon le Dictionnaire historique de la Suisse (article « Constitution fédérale »), c’est cette possibilité qui marque l’introduction d’une forme de démocratie semi-directe dans la vie politique suisse. Le 7 mars 2010, les citoyens ont par exemple refusé par près de 73 % des voix et 45 % de participation la modification de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (dit « taux de conversion minimal »), votée en décembre 2008 par l’assemblée fédérale, prévoyant une baisse des rentes.

Enfin, l’initiative populaire, instituée en 1891, donne le droit à tout électeur de proposer une modification de la Constitution (ou l’adjonction d’une nouvelle disposition). Il doit réunir à cet effet 100 000 signatures en l’espace de dix-huit mois. S’il y parvient – mais il s’agit évidemment dans la plupart des cas d’un travail collectif –, la proposition est soumise au vote de l’ensemble du corps électoral et doit recueillir également la double majorité populaire et cantonale. L'initiative populaire donne le plus souvent lieu à un contre-projet, élaboré par les autorités et soumis au peuple lors de la même votation. Depuis 1987, il est possible d'accepter l'initiative et son contre-projet (double oui). En cas de double acceptation, une question subsidiaire posée lors de la votation permet de départager les projets. Pour être acceptés, l'initiative et le contre-projet demandent la majorité du peuple et des cantons. C’est une initiative populaire qui est à l’origine de la votation du 29 novembre 2009, refusant la construction des minarets par 57,5% de oui, et le soutien de vingt-deux cantons avec une participation de 53,4 % du corps électoral.

Les institutions et la pratique des votations varient considérablement selon les cantons et les communes. Au niveau cantonal, le fédéralisme suisse repose sur une grande autonomie d’organisation politique qui se traduit par vingt-six sous-systèmes analogues [Kriesi, 1998]. De façon générale, les droits populaires sont beaucoup plus développés dans les cantons alémaniques que dans les cantons latins, du point de vue du champ de compétences des votations, généralement plus large, comme du nombre, le plus souvent plus faible, de signatures exigé pour déposer une votation [Baglioni, 2004 ; Kriesi 1998]. Les cantons ne connaissent pas seulement l’initiative populaire constitutionnelle, mais aussi l’initiative populaire législative qui donne la possibilité aux citoyens de proposer l’adoption d’une nouvelle loi. Certains cantons ont instauré également le référendum financier – par lequel certaines dépenses publiques doivent être approuvées par les électeurs – ainsi que le référendum législatif. Dans ce dernier cas, toutes les lois adoptées par le Parlement cantonal doivent être soumises au vote des électeurs.

Le rapport de Sébastien Micotti sur La démocratie communale en Suisse dresse un panorama détaillé des droits populaires au niveau communal à partir de l’étude des cent dix-huit communes de plus de 10 000 habitants, représentant au total 42 % de la population suisse. Il existe deux grands types de communes, celui qui connaît le système d’assemblée communale (de tous les citoyens), dit système ordinaire, et celui dans lequel les communes sont dotées d’un Parlement communal, dit système extraordinaire. Il existe un petit nombre de communes qui ne connaissent ni Parlement communal, ni assemblée communale, « tout se décide donc dans les urnes, en principe sur proposition de l’exécutif communal » [Micotti, 2003, p. 28]. Dans le système avec Parlement communal, le « référendum populaire, [est] conçu comme restitution du pouvoir de décision au corps électoral dans un système de démocratie représentative » [ibid., p. 34], par opposition au régime de démocratie directe qui caractérise le système d’assemblée communale (dit organisation ordinaire) dans lequel les votations apparaissent comme un dispositif de mise en œuvre des pouvoirs des concitoyens. Ce fonctionnement communal est antérieur aux mouvements révolutionnaires de la fin du xviiie siècle. On le trouve dans tous les cantons, à l’exception de ceux de Genève et de Neuchâtel. « Le régime de l’assemblée communale représente aux yeux de certains la forme la plus pure de démocratie directe, son expression la plus immédiate. Les citoyens réunis en assemblée ne se contentent pas de voter, mais prennent part aux décisions, intervenant dans le débat, ou soulevant les questions relatives aux domaines de la compétence communale. » [ibid., p. 25] Sur les cent dix-huit communes étudiées par Micotti, trente-six ont conservé le système d’assemblée communale, mais il s’agit surtout des plus petites communes.

Enfin, la constitution suisse reconnaît également le droit de pétition. Toute personne « capable de discernement », majeure, et donc pas seulement les électeurs – ce qui inclut les étrangers – a le droit d’adresser par écrit aux autorités des demandes, des propositions ou des plaintes concernant n’importe quelle activité de l’État. Les autorités sont tenues d’en prendre connaissance. L’obligation de répondre n’est pas prévue légalement, mais dans la pratique, toute pétition est examinée et fait l’objet d’une réponse. Les pétitions ont joué un grand rôle dans l’histoire suisse, notamment dans la première moitié du xixe siècle. Le développement des référendums a diminué son importance, mais la pratique, beaucoup moins contraignante que les procédures référendaires, n’a pas disparu.

2. La procédure référendaire

Pour bien comprendre la dynamique des votations, il faut prendre en considération l’ensemble du processus référendaire dont le vote ultime est l’aboutissement. Du déclenchement d’une votation, à la campagne référendaire, puis au vote et enfin à l’après-vote, toutes les étapes, strictement réglementées, participent du dispositif politique des droits populaires.

Le déclenchement d’une votation


Une des spécificités fondamentales de la procédure référendaire suisse a trait à son déclenchement. Les référendums sont soit de droit, soit déclenchés par des citoyens. Comme le souligne le Guide de la démocratie directe, les référendums « sont initiés et contrôlés non par en haut mais par en bas » [IRI, 2007, p. 93]. L’agenda des votations n’est donc pas maîtrisé par la classe politique, ce qui distingue aux yeux des Suisses le référendum d’un plébiscite.

Référendum et Plébiscite

Le Guide de la démocratie directe distingue trois types de consultations des citoyens :

- Les référendums obligatoires, inscrits dans les constitutions autrichienne, danoise et italienne et suisse pour des motifs divers.

- Les référendums facultatifs, déclenchés à l’initiative de citoyens, dont relèvent deux des votations suisses mais aussi le référendum abrogatif italien.

- Le plébiscite des autorités, improprement dénommé référendum, déclenché à l’initiative des autorités, comme le référendum français.

Les deux premiers types de référendum qui ont pour but de donner du pouvoir aux citoyens appartiennent au répertoire de la démocratie directe, à la différence du référendum-plébiscite dont l’objectif est de donner du pouvoir aux représentants[9].

Les comités d’initiative (groupe ad hoc, association, parti) d’une votation jouent un rôle-clef dans les référendums facultatifs et les initiatives populaires, tout d’abord par la rédaction du texte qu’ils soumettent à la signature des citoyens pour demander une consultation. Si les dispositions légales sont respectées (titre, contenu des listes à signer), l’initiative est validée par la Chancellerie fédérale et publiée dans la Feuille fédérale, publication officielle de la Confédération, avec les noms des « initiants ». La collecte des signatures peut alors commencer. Les modalités de validation d’un projet de votation ont varié du point de vue de la durée de la collecte. La loi fédérale de 1976 sur les droits politiques (LDP) a limité à dix-huit mois la durée de la récolte (auparavant libre). Le Parlement avait une année pour examiner le texte, selon la loi de procédure de 1892. Régulièrement dépassé, ce délai fut d'abord porté en 1950 à deux ans pour les propositions conçues en termes généraux et à trois ans pour les projets rédigés de toutes pièces, puis fixé à trois et quatre ans par la LDP de 1976, enfin à vingt-quatre et trente mois par les révisions de 1996 et 1999. Par l’information et les débats que suscite la démarche de collecte des signatures, cette étape est une première phase importante de la délibération politique que suscite une votation.

Les méthodes de collecte des signatures se sont assez profondément transformées depuis une vingtaine d’années. De la sollicitation directe des citoyens devant les bureaux de vote, on est passé à des campagnes postales, puis électroniques, par téléchargement de feuilles de signatures sur le Net. Les organisations impliquées dans les comités d’initiatives peuvent déployer des moyens importants pour collecter des signatures, pouvant aller jusqu’au million de francs suisses (700 000 euros) en cas de collecte par courrier postal à tous les ménages.

Quand la collecte des signatures est achevée, les listes sont vérifiées par les communes, puis remises à la Chancellerie fédérale, qui constate formellement l'aboutissement, avant l’examen par le Conseil fédéral et l’Assemblée fédérale qui vérifient la conformité du texte avec les exigences constitutionnelles, notamment le respect des règles impératives du droit international. Le site de la Chancellerie fédérale publie les initiatives en suspens et objets soumis au référendum facultatif au stade de la collecte des signatures, leur l’état d’avancement et les résultats. Toutes n’aboutissent pas et la Chancellerie publie de façon exhaustive la liste des votations n’ayant pas abouti. En avril 2010, outre 7 référendums obligatoires prêts à passer en votation, il y avait 13 initiatives et 11 référendums facultatifs au stade de la collecte des signatures. Parmi les initiatives en cours, toutes publiées sur le site de la Chancellerie fédérale, on peut, entre autres sujets, citer l’initiative « pour des salaires équitables », déposée par la Jeunesse socialiste suisse, dont la collecte des signatures a commencé le 6 octobre 2010. Le texte soumis à signature propose de modifier la Constitution en introduisant un nouvel article 110a, stipulant que « Le salaire le plus élevé versé par une entreprise ne peut être plus de douze fois supérieur au salaire le plus bas versé par la même entreprise. Par salaire, on entend la somme des prestations en espèces et en nature (argent et valeur des prestations en nature ou en services) versées en relation avec une activité lucrative. » La campagne de collecte des signatures s’achèvera le 6 avril 2011.

La campagne référendaire

L’inscription des votations sur le calendrier des votations de la chancellerie ouvre la campagne référendaire, temps privilégié d’informations et de débats qui scande de façon très régulière la vie politique communale, cantonale et fédérale. Les pouvoirs publics veillent à une information équilibrée des citoyens. Depuis 1972, tous les électeurs reçoivent un livret référendaire qui expose tous les points de vue. D’abord rédigé par le gouvernement, il est depuis 1983 en pratique, et depuis 1994 en droit, rédigé en partie par les comités d’initiative et référendaire. Outre l’information officielle, les campagnes sont alimentées par les comités d’initiative, les partis, les syndicats, et des associations puissantes et parfois mieux organisées que les partis.

Même si toute publicité à la radio et à la télévision est interdite, les dépenses peuvent aller de plusieurs centaines de milliers d’euros à des millions d’euros pour les votations les plus disputées. Les associations patronales notamment, quand elle estiment que leurs intérêts sont en jeu, n’hésitent pas à investir de façon conséquente dans les votations. « Économiesuisse », la principale association faîtière du patronat, joue ainsi un rôle fondamental dans les campagnes référendaires. L’association a pour rôle de veiller à la défense des « conditions-cadre optimales pour les entreprises suisses », notamment le maintien de la liberté des entreprises, et revendique « un lobbying intense à tous les niveaux du processus législatif (participation à des groupes d'experts, préparation d'actes législatifs, procédures de consultation, prises de décisions par le Conseil fédéral et le Parlement, votations populaires). »[10] Dans la dernière votation de mars 2010, portant sur le financement des retraites, « Économiesuisse » aurait ainsi engagé de 8 à 10 millions de francs suisses (5,6 à 7 millions d’euros). Certes, l’association patronale n’a pas obtenu satisfaction lors de cette votation, mais une de ses responsables romandes indiquait dans Le Matin du 3 mars 2010 que, depuis 1992, l’implication de l’organisation patronale aurait initié le résultat de 67 votations sur 72 depuis 1992[11].

Les modalités du vote

L’effervescence référendaire ne signifie pas qu’on vote en permanence. Dans la plupart des cas, lorsqu’une votation fédérale a lieu, les cantons et les communes en profitent pour organiser le même week-end leurs propres votations. Les scrutins sont en fait regroupés et organisés quatre fois par an selon un calendrier prévu longtemps à l’avance. Les dates des votations fédérales sont d’ores et déjà fixées jusqu’en 2028. Pour 2010, elles ont été ainsi programmées pour le 7 mars, le 13 juin, le 26 septembre et le 28 novembre, mais cela ne signifie pas que toutes les dates seront effectivement utilisées. Il n’y a par exemple pas eu de votation populaire à la date prévue, le 12 février 2006. S’ils acceptent un calendrier commun, les 26 cantons et 2614 communes sont souverains en matière d'organisation des scrutins. «Le fédéralisme produit une mosaïque d'entités et, donc, de réglementations », explique H.-U. Wili. Seule démocratie pratiquant l’assemblée physique des citoyens votant à main levée, la Suisse est également le laboratoire du vote par correspondance et même du vote électronique.

Le vote à main levée. Avec le canton de Glaris, Appenzell Rhodes-Intérieures est le dernier canton à connaître l’institution de la Landsgemeinde, « assemblée solennelle lors de laquelle les citoyens (masculins jusqu'à la fin du xxe s.) jouissant du droit de vote élisent les autorités et débattent des affaires du pays »[12]. Considérée parfois comme l’expression la plus aboutie de la démocratie directe, la Landsgmeinde substitue au vote par les urnes la réunion physique de tous les citoyens du canton. Ceux-ci se réunissent une fois par an, le dernier dimanche d’avril (Appenzell Rhodes-Intérieures) ou le premier dimanche de mai (Glaris) sur la place principale du chef-lieu du canton pour élire les plus hautes autorités politiques et judiciaires du canton, et pour délibérer et légiférer sur les questions politiques importantes.

Le vote postal. La Suisse se signale également par l’importance du vote postal, admis en Suisse depuis 1994. Dès la fin des années 1990, près de la moitié des Suisses ont voté par correspondance. Ainsi à Genève, depuis les votations du 13 juin 1999, chaque électeur a la possibilité, s’il le souhaite, de voter par correspondance sans avoir à en faire la demande, dès la réception de son matériel de vote. L’effet est significatif : à Genève, le vote postal, pratiqué par 95 % des votants, a entraîné une hausse de 20 points de la participation (de 30-35 % en 1995 à 50-55 % en moyenne annuelle dès le début des années 2000). La participation genevoise est désormais l’une des plus élevées du pays, qui vote à plus de 80 % par voie postale.

Le vote électronique. En 2000, des essais-pilotes de vote électronique ont été initiés à Genève, Neuchâtel et Zurich. Suite au rapport d’évaluation publié en 2006[13], le Conseil fédéral a engagé un processus de modifications légales et réglementaires de façon à permettre une extension du vote électronique. En 2008, une deuxième étape d'essais élargis de vote électronique a commencé, qui vise à ce que 10 % de l’électorat puisse en 2011 avoir recours à ce type de vote. Bâle-Ville et Genève l’ont expérimenté, en particulier pour les Suisses de l’étranger. Le 8 février 2009, les électrices et électeurs genevois ont approuvé par une majorité de 70,2 % l’inscription du vote par internet dans la constitution cantonale, mettant fin, au plan cantonal, à la phase-pilote. Un canton ayant mené avec succès cinq essais consécutifs de vote électronique peut demander une autorisation « élargie » au Conseil fédéral. De nombreux cantons veulent suivre la même voie, non sans que cela fasse débat. Si les autorités fédérales perçoivent les possibilités électroniques comme une nouvelle chance et une nouvelle dimension des « droits populaires », le vote électronique suscite de fortes oppositions de tous bords politiques. Selon H.-U. Wili, chef du projet «Vote électronique » à la Chancellerie fédérale, la généralisation dans toute la Suisse et dans tous les domaines des votations et élections via Internet ne sera pas possible avant des dizaines d'années.

L’après-vote. Le vote ne clôt pas la dynamique référendaire, puisqu’il faut traduire juridiquement les décisions populaires. Cette étape est un élément important du processus référendaire et pas toujours aisée. Ainsi, le 27 septembre 2009, une votation populaire, prenant acte de l’incapacité de traduire une première votation dans les textes, a abrogé l'initiative populaire générale votée en 2003. Le nouvel article introduit dans la constitution devait offrir l'opportunité à 100 000 citoyens de réclamer une nouvelle législation, et pas seulement une disposition constitutionnelle. L'initiative générale a été enterrée sans avoir jamais été utilisée ; 67,9 % des votants ont accepté de supprimer ce droit populaire inscrit en 2003 dans la constitution. Après une campagne quasi inexistante, tous les cantons se sont laissé convaincre que l'initiative populaire générale serait trop difficile à appliquer. Cela dit, même négatifs, les résultats d’un vote plus ou moins serré exercent leurs effets sur les décisions des élus, qui peuvent proposer des dispositions législatives prenant en compte certaines attentes exprimées dans les votations.

3. La pratique de la démocratie directe

« Chaque semaine, une initiative populaire ou un référendum est lancé quelque part en Suisse » [Kaufmann et alii, p. 88]. Toutes les demandes de votations n’aboutissent pas, toutes ne suscitent pas les mêmes débats, mais les référendums impriment de façon profonde leur marque dans la vie politique helvétique. Les objets, la participation et les résultats des votations fédérales, auxquelles nous nous limiterons ici, permettent d’en prendre la mesure.

Les objets des votations

Depuis la révision totale de la constitution helvétique de 1848, premier référendum obligatoire, à « l'interdiction d'abattre le bétail de boucherie sans l'avoir préalablement étourdi », première initiative populaire de 1893, jusqu’à la modification de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 28 novembre 2010[14], l’éventail des questions soumises à référendum est vaste. Quel que soit le type de référendum, les votations ne portent pas sur des questions de personnes, ni directement ni indirectement. Rappelons que les référendums obligatoires comme les initiatives populaires, et les éventuels contre-projets, portent sur la Constitution, les référendums facultatifs concernent toute activité législative.

1) Le classement des thèmes se fonde sur "Année politique suisse", édité par l'Institut de science politique à l'Université de Berne.

2) Les initiatives populaires avec contre-projet sont comptées comme une seule votation.

Source : Office fédéral de la statistique

Le classement des votations par grandes catégories (tableau 3) met en évidence les thèmes qui mobilisent le plus les votations au cours des quarante dernières années. D’après les statistiques fédérales, sur l’ensemble des 330 votations ayant eu lieu entre 1971 et 2010, les plus nombreuses (23,33 %) ont porté sur la politique sociale, plus d’un cinquième (20,91 %) ont concerné les questions d’infrastructure, aménagement, environnement, les votations relatives au régime politique arrivant en troisième avec (14,55 %). On peut noter la faiblesse des votations portant sur les sujets de sécurité, de politique étrangère ou encore d’enseignement, culture et médias.

Si on s’intéresse à l’évolution de sujets, depuis les années 1970, on observe une augmentation des votes sur le régime politique au cours des deux dernières décennies, une baisse considérable des votes sur l’économie, qui passent de 18,5 % à 2,5 % ; une hausse continue des votes sur la politique sociale (de 16 à 32,5 %) ; l’importance assez stable des votes sur l’infrastructure, aménagement, environnement, à un niveau assez élevé. Les sujets de politique sociale comptent dans la dernière décennie pour plus de 32,5 % des votations, alors que les sujets économiques tombent à 2,50 %. Le faible pourcentage de votations sur les questions d’économie peut s’expliquer par une définition très restrictive de la catégorie, par rapport à celle intitulée « politique sociale », mais aussi être le signe d’un relatif consensus sur l’organisation économique… Le fort contraste plaide en faveur d’un effet de construction des catégories. On peut noter, enfin, que l’inquiétude sociale ne s’accompagne que d’une croissance modérée des votations sur les questions de sécurité (7,5 %).

La participation

L’idée que la participation aux votations est faible et inférieure à la participation aux élections législatives est assez répandue. Les données publiées par l’Office fédéral de la statistique sur la participation aux élections du Conseil national et aux votations depuis 1911 conduisent à nuancer assez fortement cette idée. Jusqu’en 1990, l’opinion n’est pas erronée. On vote effectivement plus aux élections du Conseil national qu’aux votations. On constate en outre une baisse de l’intérêt pour les votations, le taux de participation passant de 59,7 % à 40,9 %. De 1911 à 2010, la participation aux votations a baissé du quart, mais celle aux élections législatives a reculé de plus de 42 % ! Depuis vingt ans, le taux de participation aux élections s’est rapproché de celui des votations. En fait, depuis les années 1970, la participation aux votations a augmenté de plus de 3 points, là où la participation aux élections législatives a continué à reculer de plus de 5 points. L’écart entre les deux taux de participation, de près de 20 points se réduit désormais à 1 point. Si la tendance se poursuivait, la participation aux votations pourrait devenir supérieure à celle des élections législatives.

L’augmentation de la participation est d’autant plus remarquable qu’elle se produit dans un contexte de fréquence accrue des votations. Il y a eu 106 votations entre 1971 et 1990, et 185 votations dans les vingt années suivantes. L’explication de l’introduction du vote postal ne peut être retenue, car elle devrait également affecter la participation aux élections législatives. On est donc loin d’un essoufflement de la participation citoyenne aux votations, cela serait plutôt le contraire.

Les résultats

Il existe de fortes inégalités dans les taux de réussite selon le type de votation. Sur l’ensemble de votations depuis 1848, les trois-quarts des référendums obligatoires sont ratifiés, contre un peu plus de la moitié des référendums facultatifs, et un dixième seulement des initiatives populaires (tableau 5).

Source : Office fédéral de la statistique

Si, dans l’ensemble, les votations acceptées sont presque aussi nombreuses que celle rejetées par les électeurs, les résultats divergent sensiblement selon le type de consultation. Trois fois sur quatre, le peuple suit les décisions de modification de la constitution votées par l’assemblée fédérale. Il confirme un peu plus de la moitié des lois soumises à une votation suite à un recours des citoyens, mais se montre en revanche très réticent à adopter les initiatives populaires : moins de 10 % de celles-ci sont approuvées par les citoyens. Il semble toutefois se produire depuis le début du siècle une évolution assez significative. Ainsi, au cours des dix dernières années, le taux d’acceptation des référendums obligatoires est devenu inférieur à 70 %. Le taux d’acceptation a cependant augmenté pour les référendums facultatifs, mais également pour les initiatives populaires.

L’interprétation n’est pas aisée. La baisse du nombre de référendums obligatoires acceptés traduit une plus grande distance par rapport aux décisions de l’assemblée fédérale, mais en revanche le peuple confirme davantage les choix législatifs. Cela peut cependant être aussi le signe d’une meilleure prise en compte des attentes des citoyens. Même si le taux d’acceptation des initiatives populaires reste faible, dépassant à peine les 15 %, depuis 2001, le peuple les ratifie cependant également deux fois plus souvent qu’au cours de la décennie précédente. Ces données peuvent être l’indice d’une plus grande ouverture du débat politique, voire d’un effritement du consensus.

En tout état de cause, il ne faut pas s’arrêter au résultat final d’un scrutin. Il serait erroné de déduire du faible taux de réussite des initiatives populaires que les citoyens échouent le plus souvent à influencer l’action politique. Les droits populaires exercent un effet en amont sur les institutions représentatives, conduisant les élus à prêter attention aux attentes des citoyens. Même les votations refusées exercent leurs effets. Lorsqu’une votation est rejetée, cela ne signifie pas nécessairement que la délibération populaire soit sans effet. Les chambres peuvent de façon indirecte ou atténuée intégrer certains éléments en jeu dans une votation dans la législation en rapport avec l’enjeu du référendum. Les droits populaires exercent une influence directe et indirecte profonde sur la vie politique suisse.

4. Les vertus des droits populaires

Les droits populaires donnent une forme moderne à la pensée des sophistes, présentée et discutée par Socrate dans le dialogue « Protagoras » de Platon, selon laquelle tous les citoyens sont dotés de l’areté, la vertu, cette disposition à intervenir en acte et en parole dans les affaires publiques [Bevort, 2007]. Ils expriment une conception de l’art politique selon laquelle, contrairement à ce que pensait Platon, l’areté ne relève pas de la connaissance, mais d’une conception pragmatique de la vertu qui attribue à tous les citoyens les qualités d’aidôs (la honte) et de dikê (justice, règle), incitant chacun à agir pour le bien de la cité. Les procédures référendaires reposent sur la confiance dans la compétence démocratique des citoyens, sur l’idée que la vertu représente « l’excellence propre de l’homme, laquelle ne s’incarne nulle part mieux que dans l’action politique » [Raynaud, Rials, 1996, p. 725]. Elles font également écho à l’idée que la vertu est le principe de la démocratie, selon les mots de Montesquieu. Les votations mettent en évidence comment les institutions et la pratique des droits populaires se nourrissent l’un l’autre, stimulent l’art politique des citoyens. Elles apparaissant comme autant d’ateliers pratiques de la démocratie, qui exemplifient la triple vertu délibérative, régulatrice et éducative de la participation citoyenne à la vie de la cité.

Les vertus délibératives

Le fait qu’il ne se passe pour ainsi dire pas de semaine sans qu’une initiative populaire ou un référendum ne soit initié quelque part en Suisse, à un niveau ou à un autre, illustre la dynamique délibérative des droits populaires. Les votations alimentent de façon quasi continue des débats politiques approfondis sur tous les sujets qui importent dans les affaires de la cité. Si l’on partage l’idée d’Amartya Sen, selon laquelle « la meilleure définition de la démocratie est celle de gouvernement par la discussion » [2009, p. 386], cette qualité délibérative des droits populaires est une vertu essentielle. Elle importe d’autant plus qu’elle ne se limite pas à mettre en scène une démocratie d’opinion, mais donne corps à un véritable pouvoir délibératif qui se manifeste à travers la maîtrise de l’agenda politique, l’animation des débats politiques, et un réel pouvoir de décision.

Les référendums facultatifs et les initiatives populaires donnent aux citoyens un accès privilégié à l’agenda politique, en leur permettant de mettre à l’ordre du jour des sujets que la classe politique n’aurait pas nécessairement mis en débat. Au niveau fédéral, les initiatives populaires imposent ainsi des délibérations sur les grands débats de société (l’emploi, l’environnement, les retraites, les transports publics, la poste, le temps de travail, l’assurance maladie… ). Aux niveaux cantonal et communal, les débats sur les « grands » enjeux (les budgets cantonaux) comme sur les « petites » questions de voisinage (la création d’une zone de vitesse limitée à 30 km/h par exemple) ne sont pas moins sujets à donner vie à une conception du politique comme vivre et agir ensemble, qui ne limite pas le pouvoir citoyen à l’élection des représentants.

Les droits populaires reconnaissent aux citoyens un pouvoir de décision important. Les référendums obligatoires et les initiatives populaires donnent aux citoyens le dernier mot en matière constitutionnelle. La possibilité des référendums facultatifs sur tout vote législatif conduit les élus à prêter une grande attention à l’opinion publique. Les processus référendaires déplacent les enjeux de la vie politique des questions de personnes aux questions politiques, ce qui distingue singulièrement la Suisse de la vie politique française grandement polarisée par l’enjeu présidentiel.

Les vertus régulatrices

Outre le fait d’impliquer les citoyens dans le débat et la décision politique, les droits populaires exercent un effet de régulation sur la vie politique suisse. Ils produisent une redistribution du pouvoir politique et contribuent à une autre conception du travail politique professionnel.

Le pouvoir politique est très faiblement concentré dans le système politique suisse. Avec l’autonomie cantonale et le bicamérisme, les droits populaires forment système pour imposer un partage équilibré des pouvoirs politiques entre la fédération et les cantons. Historiquement, les droits populaires se sont développés parallèlement à la construction du système confédéral. Le référendum obligatoire est inscrit en 1848 dans la constitution fédérale fondatrice de la Suisse moderne. Le référendum facultatif, instauré lors de la révision modérée de la constitution promulguée le 29 mai 1874, permettant alors à 30 000 citoyens ou huit cantons de provoquer une votation pour rejeter une loi ou un arrêté fédéral, est notamment mis en place pour apaiser les craintes d’une centralisation opérée par voie législative. Pour Lehmbruch, la création du référendum facultatif a, « dans le long terme induit les coalitions gouvernantes à coopter les principaux partis minoritaires dans l’exécutif fédéral, (…) dans l’espoir de leur faire abandonner le recours aux référendums » [1993, p. 6]. La double majorité cantonale et populaire exigée par les référendums obligatoires et les initiatives populaires est à la fois l’expression et la garantie du fédéralisme.

Outre l’effet en amont sur le mode de fonctionnement de la démocratie représentative, déjà souligné, la dynamique potentielle des votations contraint le système politique à la transparence, à l’information, à l’écoute. Elle oblige à rendre compte des décisions comme des projets, à engager les consultations les plus larges en amont des décisions parlementaires. Tous ces mécanismes produisent une autre conception du politique, moins centrée sur le pouvoir et le savoir. Les droits populaires élèvent le statut des citoyens à celui de politiciens occasionnels. La démocratie directe limite la professionnalisation et la personnalisation de la politique. La présidente ou le président de la Confédération change chaque année, et les députés sont le plus souvent à temps partiels. La démocratie n’y est pas le domaine réservé des professionnels. Les droits populaires contrarient les tendances à la prolifération bureaucratique de l’appareil d’État et à l’oligarchie et la fermeture sur soi du personnel politique. Loin de creuser la distance entre les professionnels de la politique et les citoyens, les votations rapprochent citoyens et politiciens et imposent une relation plus continue entre les représentants élus et les citoyens. La participation aux votations de tous les citoyens à tous les niveaux communal, cantonal, fédéral crée une forte identité suisse, favorise l’intégration politique et accroît la légitimité des décisions politiques.

Les vertus éducatives

Dans La démocratie des autres, A. Sen attribue trois avantages à la démocratie pour les citoyens [Sen, 2006, p. 70-71]. Premièrement, la participation politique et sociale représente une valeur intrinsèque pour la vie humaine et son bien-être. Deuxièmement, la démocratie a une valeur instrumentale dans l’amélioration de la réceptivité à l’expression et à la satisfaction des besoins politiques mais aussi économiques et sociaux des gens. Troisièmement, la pratique de la démocratie donne l’opportunité aux gens d’apprendre les uns des autres, et aide la société à former ses valeurs et ses priorités.

Deux chercheurs suisses, Mathias Benz et Alois Stutzer, confirment à cet égard, de façon frappante, le rôle constructif de la démocratie. Selon les théoriciens du public choice, rappellent-ils dans leur article « Are Voters Better Informed When They Have a Larger Say in Politics? Evidence for the European Union and Switzerland » [2004], les citoyens sont rationnellement ignorants en matière politique parce que les coûts d’information excèdent largement l’utilité que les individus en retirent. L’électeur rationnel sait que son vote a peu d’effet sur le résultat d’un vote, donc il a « intérêt » à s’abstenir. En fait, démontrent les deux chercheurs, le coût de l’information comme l’utilité de celle-ci peuvent largement varier en fonction du système politique. Plus on offre aux citoyens des opportunités de participer à la vie politique, mieux ils sont en effet informés. Exploitant une enquête suisse qui permet de mettre en rapport d’un canton à l’autre les connaissances politiques et l’étendue des dispositifs de démocratie directe, les données indiquent clairement une corrélation positive entre ces deux variables. Plus on a de possibilités de participer, mieux on est informé, toutes choses égales par ailleurs. L’effet sur le niveau d’information lié à une plus grande possibilité de participation est comparable à l’effet éducation ou l’effet revenu. L’analyse d’une enquête européenne sur les connaissances en matière d’institutions communautaires aboutit au même résultat. Dans les pays où les électeurs ont pu s’exprimer par référendum sur le traité européen, les connaissances sont meilleures, à l’exception toutefois notable de la France.

Faisant la synthèse d’autres travaux ayant étudié la relation entre démocratie directe et performance économique, le Guide de la démocratie directe rend compte d’un certain nombre de résultats qui indiquent que le degré d’extension des droits populaires ne nuit pas à la performance économique des cantons, au contraire. Selon les travaux de deux économistes de St-Gall, G. Krichgässner et Lars Feld [Kaufmann et alii, p. 83-84], les résultats seraient assez convergents. Dans les cantons où l’on participe le plus, la performance économique en termes de PIB par tête est de 15 % plus élevée. Là où les citoyens peuvent voter sur le budget cantonal, l’évasion fiscale est inférieure de 30 %, correspondant à un montant moyen de 1500 francs suisses. Les dépenses publiques sont 10 % moins élevées dans les communes dont les citoyens peuvent approuver le budget par référendum. La dette publique y est moins grande de 25 %. Les services publics coûtent moins cher dans les communes connaissant la démocratie directe. Dans son ouvrage, Société civile et capital social en Suisse, Simone Baglioni résume bien le processus éducatif des droits populaires [2004, p. 189] : « Comme Pateman l’avait suggéré, l’intérêt et la compétence politiques ne sont pas innés, mais bien plutôt modelés par le système politique. Un système participatif incite davantage la compétence et l’intérêt pour la politique qu’un système de délégation qui favorise l’apathie et l’incompétence ». La participation fait prendre conscience que les sorts des citoyens sont liés.

Droits populaires et démocratie consociative


Pour le théoricien du consociatonalisme, Arendt Lijphart, la Suisse, en tant que pays segmenté dont le fonctionnement démocratique repose sur le partage du pouvoir et le consensus, constitue un exemple paradigmatique de démocratie consociative [Lijphart, 1977]. Les démocraties consociatives représentent des « formes fortes de démocraties de consensus » (Lijphart, 1994, p. 3) qui, avec les démocraties majoritaires, constituent pour cet auteur les deux principaux types de démocraties [Lijphart, 1984]. Dans les sociétés affectées par de profondes divisions linguistiques, religieuses, culturelles, idéologiques, la régulation politique par le simple principe de la majorité ne suffit pas. En maximisant la règle de la majorité qui emporte la décision (« maximize the size of the ruling majority », 1999, p. 33), la démocratie de consensus produit non seulement une meilleure représentation des différents segments composant la société, mais également un gouvernement plus efficient. Dans Patterns of Democracy [1999], Lijphart retient dix critères pour caractériser une démocratie de consensus : la grande coalition, l’équilibre entre les pouvoirs législatif et exécutif, le multipartisme, la représentation proportionnelle, le corporatisme de groupes d’intérêt (un libéral corporatisme), le fédéralisme, un bicamérisme fort, la rigidité constitutionnelle, le contrôle judiciaire des lois et réglementations, l’indépendance de la banque centrale. En l’absence de contrôle judiciaire, la Suisse satisfait neuf de ces dix critères.

De façon assez surprenante, les droits populaires ne figurent pas parmi les dix caractéristiques énoncées par Lijphart dans son analyse de la Suisse comme exemple de démocratie de consensus. Le référendum n’apparaît que comme facteur de rigidité constitutionnelle parce que les amendements à la constitution requièrent une double majorité cantonale et populaire. La reconnaissance tardive du suffrage féminin est une bonne illustration de la difficulté qu’introduit cette exigence de double majorité. Cette relative inattention aux droits populaires est probablement liée au rôle privilégié que Lijphart attribue aux élites dans son modèle théorique. Le consensus y apparaît comme le fruit d’une coopération entre les leaders des différents « segments » qui composent le pays. Pourtant, les droits populaires sont probablement, avec le fédéralisme et la concordance, un des rouages-clefs de la démocratie consociative suisse. Pour Lijphart, la concordance concerne les élites, mais le possible, voire nécessaire, recours au peuple en cas de décision importante est une puissante contrainte au compromis. En consacrant les citoyens comme des acteurs à part entière dans la vie politique suisse, les votations imposent aux élites un fonctionnement qui ne peut se réduire aux accords entre les élites. La démocratie suisse apparaît autant comme le fruit des décisions des élites que comme le choix des citoyens. A. Trechsel et P. Sciarini [2003], à partir de l’analyse des votations depuis 1947, concluent que les droits populaires ne mettent pas en cause la légitimité des dirigeants politiques. De même, S. Baglioni souligne, dans son ouvrage Société civile et capital social en Suisse, que « les citoyens suisses montrent en effet un niveau de confiance institutionnelle plus élevé que la moyenne relevée dans les pays de l’Europe de l’Est et de l’Ouest » [Baglioni, 2004, p. 195].

Si la démocratie de consensus bénéficie de la confiance politique des citoyens, c’est peut-être parce que les institutions politiques leur donnent un droit de contrôle important sur la vie politique. C’est parce que les droits populaires sont potentiellement autant facteurs de dissensus que de consensus qu’ils imposent un fonctionnement poussant tous les acteurs à construire des compromis qui reposent sur l’accord le plus large. Les votations n’éliminent donc pas les conflits, l’expression des dissensus, ils en sont au contraire un outil d’expression, mais aussi un mode de dépassement. Ils agissent de fait comme un facteur de légitimité et de stabilité du système politique.

Ce faisant, les droits populaires, en donnant aux citoyens les outils d’une citoyenneté active introduisent un élément d’incertitude qui peut affecter la logique même du système de démocratie semi-directe. L’augmentation des référendums et les clivages sociétaux qu’ils mettent en lumière traduisent une polarisation croissante de la vie politique suisse. L’émergence de l’UDC et certaines votations comme celle sur l’interdiction des minarets en sont les signes indéniables. On peut également observer que les votations les plus importantes donnent lieu à un véritable marketing politique, dont les dépenses de plus en plus élevées engagées dans les campagnes référendaires sont l’indice. La logique du régime est-elle pour autant en cause ? Chacun est tenté d’évaluer à l’aune de ses propres opinions politiques ou académiques les méfaits-bienfaits de la démocratie directe. Les uns liront l’évolution en cours comme la manifestation des excès de démocratie, ou comme une dérive populiste, la démonstration de l’immaturité des citoyens. D’autres font confiance aux vertus des droits populaires pour trouver des solutions aux tensions qui se manifestent. Quelle que soit l’appréciation que l’on porte, la croissance de votations, les dénis apportés aux élites, que cela soit sur les minarets ou l’assurance-chômage, montrent que le peuple suisse s’affirme comme un acteur autonome par rapport aux organisations représentatives et leurs leaders, confirmant que la démocratie de consensus ne signifie pas l’absence de conflits. Le coût croissant des votations représente de toute évidence un facteur d’inégalité amenant certains observateurs à estimer que cela fait de la démocratie politique suisse un modèle coûteux, accessible seulement aux nantis et aux acteurs organisés. Outre que cela vaut probablement plus encore pour les campagnes électorales, les moyens financiers ne sont pas toujours gagnants. On peut même penser que, plus que pour les élections, les votations accroissent le pouvoir citoyen et atténuent les inégalités de fortune et d’éducation.

Les interrogations sur l’avenir de la démocratie consociative ne sont pas nouvelles. Au début des années 1990, G. Lehmbruch se demandait si l’effritement de la cohésion des segments minoritaires, notamment catholiques et socialistes, et la montée de l’individualisme n’érodaient pas les traditions consociatives suisses. Il concluait cependant que la persistance des clivages linguistiques et culturels, l’architecture institutionnelle et la socialisation politique des élites lui semblaient assurer au système politique suffisamment de flexibilité pour être « capable de survivre à l’érosion des réseaux organisationnels traditionnels » [Lehmbruch, 1993, p. 59]. Près de vingt ans plus tard, l’interrogation demeure, mais elle est peut-être propre à tout système démocratique, dont les ressorts sont autant de mises en tension permanente. La Suisse est probablement un des rares exemples de démocratie réflexive au sens de P. Rosanvallon, c’est-à-dire comme un système disposant de « mécanismes correcteurs et compensateurs » des limites de la démocratie électorale-représentative, [2008, p. 195-196]. Sans le citer, les analyses de Rosanvallon, notamment quand il parle d’une forme d’ « encadrement du système majoritaire », rejoignent celles de Lijphart. Plus encore que le politologue néerlandais, Rosanvallon ne prend toutefois guère en compte les droits populaires comme une forme de dépassement de la règle majoritaire, privilégiant comme mécanisme correcteur le contrôle de constitutionnalité ou les formes de contre-démocratie, sans envisager le modèle de démocratie de consensus suisse. C’est pourtant dans les droits populaires que résident peut-être les ressources les plus efficaces permettant à la démocratie de consensus de résoudre les tensions qu’elle affronte.

Pour autant, les droits populaires n’éliment pas ce que B. Voutat [Bacqué et alii, 2005] nomme l’ambivalence de la démocratie et de la souveraineté populaire parce que cette ambivalence est pour ainsi dire l’essence même du pari démocratique. La démocratie directe ne repose pas sur l’illusion que les citoyens garantissent la « bonne décision », mais elle postule que les citoyens sont in fine plus aptes que les rois-philosophes, les avant-gardes ou les professionnels à décider des affaires de la cité. La démocratie n’est pas un sport de spectateurs, ni une affaire de professionnels, mais une activité citoyenne. Les votations offrent dans les limites bien particulières propres à la Suisse une rare expérience assez poussée de la conception de la démocratie comme pouvoir du peuple pour le peuple par le peuple… Dans le débat engagé sur la crise qu’affrontent les institutions représentatives, l’expérience suisse offre, toutes choses égales par ailleurs, matière à réfléchir pour les démocraties représentatives à la recherche d’une nouvelle légitimité.

Références bibliographiques

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Trechsel A. H., Sciarini P., 2003, « Direct democracy in Switzerland: Do elites matter ? », European Journal of Political Research, vol. 41, Issue 6, janvier, p. 759-776.

[1] Notre analyse prend son origine dans un voyage d’études en Suisse organisé par IRI (l’Institut européen sur l’initiative et le référendum) qui a eu lieu fin septembre 2005. Nous y avons bénéficié d’un certain nombre de présentations et de rencontres avec des acteurs et des chercheurs. Outre les informations réunies lors de ce voyage, notamment dans une rencontre avec Hans-Urs Wili, chef de la section des droits politiques à la Chancellerie fédérale, et les données et analyses réunies dans le Guide de la démocratie directe en Suisse et au-delà, par Bruno Kaufmann, Rolf Büchi, Nadja Braun, édité par l’IRI [2005 pour la première édition en langue française, 2007 pour l’édition française], nos analyses sont redevables à l’ouvrage de référence de Hanspeter Kriesi, Le système politique suisse [1998], ainsi qu’au Dictionnaire historique de la Suisse, (DHS), Editions Gilles Attinger à Berne, 2002-2009, disponible [en ligne] : < http://www.hls-dhs-dss.ch/index.php?lg=f&pagename=project&pagenum=4>.

[2] Article « Démocratie de concordance » du Dictionnaire historique de la Suisse [2002-2009], [en ligne] < http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F10095.php>.

[3] Ces principes ne vont pas de soi. Ouvrant la séance du Conseil fédéral le 20 octobre 2004, le Président de la Confédération, Monsieur Joseph Deiss, a demandé à ses collègues de mettre fin à des semaines de discussions portant sur la collégialité, la concordance et les tâches du Conseil fédéral. Il a souligné que le mandat du Conseil fédéral est inscrit dans la Constitution. Celle-ci précise que le Conseil fédéral prend ses décisions en autorité collégiale, ce qui signifie que chacun des membres du gouvernement du pays doit respecter, défendre et appliquer les décisions du collège. Aux yeux du Président de la Confédération, le bon fonctionnement d'un gouvernement collégial repose sur le consensus. Pour parvenir à ce consensus, le Président attend de ses collègues qu'ils débattent de leurs divergences au sein du collège et non pas avec des déclarations publiques. (source, site de la Confédération suisse, [en ligne] < http://www.news.admin.ch/message/index.html?lang=it&msg-id=19741>)

[4] Depuis les élections du Conseil national du 21 octobre 2007, l’Union démocratique du centre compte 62 représentants (cinq UDC ont formé le Parti bourgeois démocratique en mars 2009) ; le Parti socialiste suisse, 43 ; le Parti radical démocratique, 35 ; le Parti démocrate chrétien, 31. Les autres mouvements politiques ont 29 représentants dont 20 pour Les Verts.

[5] Devenu le Parti libéral-radical au 1er janvier 2009.

[6] Traditionnellement, un conseiller fédéral est réélu jusqu'à sa démission et les cas de non réélections sont extrêmement rares. Ils ont cependant particulièrement touché l’UDC, d’abord en décembre 2003, quand sa représentante, Ruth Metzler-Arnold n’a pas réélue et fut remplacée par Christoph Blocher, qui à son tour n’a pas réélu en décembre 2007 et fut à son tour remplacé par un autre membre de l’UDC, Evelin Wildmer-Schlumpf. L’ exclusion de cette dernière de l’UDC est à l’origine de la création du parti bourgeois démocratique.

[7] Article « Droits populaires » du Dictionnaire historique de la Suisse.

[8] En 2010, le corps électoral suisse est très légèrement supérieur à 5 000 000 personnes. Il faut donc 1 ou 2 % des électeurs pour initier un référendum facultatif ou une initiative populaire, là où, en France, la loi d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 exige un seuil de 20 % des électeurs pour saisir le conseil municipal en vue de l’organisation d’une consultation sur une opération d’aménagement.

[9] En France, la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 a élargi le domaine référendaire en instituant la possibilité de soumettre un projet aux citoyens d’une collectivité territoriale sous forme d’un référendum décisionnel. Cette dispositions est toutefois dans la logique du référendum des articles 11 et 89 de la Constitution de 1958 : seul l’exécutif municipal peut proposer la soumission d’un projet au référendum. La validation suppose que la moitié des électeurs inscrits ait pris part au vote.

[10] Citations extraites de la présentation de l’association Économiesuisse sur son site web.

[11] Le Matin, 3 mars 2010.

[12] Article « Landsgemeinde » du Dictionnaire historique de la Suisse.

[13] Rapport sur les projets pilotes en matière de vote électronique, Conseil fédéral, Berne, 31 mai 2006.

[14] Dernière date des votations prises en comptes dans cet article.

[15] Source de toutes les données : l’encyclopédie statistique de la Suisse, publié par l’Office fédéral de la statistique, l’administration fédérale. Pour ce tableau, toutes les données sont mises [en ligne] : < http://www.bfs.admin.ch/bfs/portal/fr/index/themen/17/22/lexi.html>.

Source: http://antoine.bevort.free.fr/entree.html

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